JOURNAL
INTIME

Le Cyber Coming-Out (3ème partie)



Ve. 12/06/98
0h05


  Les résultats des ENSI tombent ce soir... J'espère franchement avoir bien réussi ce concours, histoire d'avoir une chance d'intégrer l'ENSIETA, puisque Supélec m'est (évidemment) passé sous le nez.

Mais bon, cela n'est pas si grave au fond. C'est vrai que ça risque d'être dur à faire avaler à mes parents, mais il faut se faire une raison...

En  fait, ce qui me préoccupe en ce moment est plus le fait d'avoir à quitter l'internat. C'est maintenant que c'est bientôt fini que je me rends compte que ça me manquera, alors qu'il y a quelques mois, je ne pensais qu'à en finir.

Et il est vrai que tout s'accélère... Demain, je dois déjà commencer à "préparer" ma chambre, puisque même si je ne rentre que samedi, je ne pourrai rien faire, si je veux prendre un train qui ne soit pas trop tard. Ensuite, je devrai aller en ville samedi après-midi, histoire de trouver un cadeau pour Rachel... j'avais pensé à une peluche... Puis je dois aller chez Papa, puis je dois imprimer quelques documents sur transparents (pour Raphaël), et on sera déjà lundi. Ah, il faut aussi que j'arrive à convaincre mes parents pour ce qui est de mon programme du 9 au 12 juillet (Lille, Raphaël, Vincent, Xavier...).

Le moins qu'on puisse dire, c'est que mes pensées sont bien mélangées ce soir, et ça se ressent sur ce que je tape... tout est pêle-mêle !

Pour en revenir à ce qui me préoccupe par-dessus tout, je viens de me rendre compte d'une nouvelle preuve que ma situation est bien anormale... Car si un jour, je me sens seul, je trouve tout le monde hostile, je me tue pour ceux que j'aime et je me rends compte qu'ils s'en foutent, etc... l'autre jour, je peux très bien comprendre ce que c'est de se trouver dans l'autre situation. Pour imaginer l'état d'esprit, voire le dégoût que peut ressentir un "straight" qui se retrouve aimé par un gay de manière "visible", il me suffit d'imaginer ce que serait d'être aimé par une fille. Paradoxalement, c'est même le cas si j'imagine d'être aimé par un garçon... qui ne me plaît pas.

D'un autre côté, il m'arrive parfois de rêver à ce que pourrait être ma vie avec Raphaël... ou parfois, je repense à un moment que j'ai passé avec lui, et j'essaye de trouver des "signes" positifs pour moi, ou encore je change complètement la fin de l'histoire... c'est à chaque fois un moment de bonheur, suivi évidemment par un douloureux retour à la réalité. Dire "dommage" ne serait de loin pas assez fort pour exprimer les sentiments qu'une telle situation peut engendrer...

Et pourtant, je me rends parfois compte que je semble être "crushed" pour pas mal de monde... il suffit d'ailleurs de voir la longue liste que j'ai tenu il y a quelques jours  ! Cela me fait penser que ce n'est que superficiel, je ne peux pas les aimer vraiment... jusqu'au moment où je les revois, et là, tout s'évanouit, je perds toute mon  assurance, je ne peux plus qu'admirer leur beauté, être présent pour satisfaire le moindre de leurs désirs. Ce soir, ma journée se sera donc terminée en pensant à Raphaël, tout comme ça aurait pu être le cas de Philippe (que j'ai aussi vu ce soir) ou encore de Jacques (qui s'est refait doucher aujourd'hui)... Dans tous les cas, cela se finit toujours de la même manière, en  ne pensant plus qu'à cette personne, et en tournant presque à l'obsession.

Une idée qui m'est venue cet après-midi serait de me faire photographier à côté de Raphaël, pour pouvoir faire un agrandissement de la photo, que j'accrocherai dans ma chambre, chez moi, à côté de Daniel&Cathy, et Daniel&Yves. A défaut d'amour, cultivons les souvenirs... Mais il n'aime pas être pris en photo, donc cela sera très difficile. Et je ne peux pas trop insister en disant que ce soit un service que je lui demande... il ne comprendrait pas... (ah, si seulement il comprenait  !)

Bien, il est 1h, donc l'heure de se coucher... et de rêver à Raphaël (et à mes lentilles...)

Ve. 12/06/98
16h40


  Ce matin, ce qui aurait pu être un service que je rendais à Raphaël s'est vite transformé en honte suprême : j'ai trouvé ses lunettes dans la salle de bains, donc je les ai récupérées et j'ai mis un mot sur sa porte pour le prévenir. Manque de pot, il laisse TOUJOURS ses lunettes dans la salle de bains (mais dans la trousse de toilette, normalement). Bref, ça l'a fait rire... et j'ai l'air con.

D'ailleurs il vient tout juste de passer dans ma chambre, pour me demander combien coûtent les transparents que je lui imprimerai ce week-end... Héhé, s'il croit que je vais le faire payer...

A part ça, la plupart des PSI de l'étage sont déjà partis. Je sens les minutes passer, et pourtant je n'ai rien à faire. C'est idiot... je m'ennuie, mais je ne veux pas que ça s'arrête  !

Bon, je crois que je vais aller en ville, histoire de passer à la FNAC pour regarder si il y a un CD du générique de FRIENDS. Qui sait, peut-être que je trouverai même un CD pour l'anniversaire de Rachel ?

To be continued...

Ve. 12/06/98
19h00


  Merci Kevin ! Grâce à lui, on vient tout juste de faire une photo des PCSI2 dans la chambre du Z. En fait, il y en a une première où ils sont tous sur le lit du Z, puis Kevin m'a remplacé (derrière l'appareil), et en a pris une seconde, pour que je puisse y figurer... juste à côté de Raphaël!!

Il y a toutes les chances que je l'agrandisse, celle-là !

En tout cas, je suis pressé de la voir... donc je vais m'empresser de finir la pellicule ce soir (et demain matin si nécessaire) pour pouvoir l'apporter à développer, en cherchant l'autre pellicule demain.

A part ça, j'ai trouvé le CD de Friends. Il est sympa, mais bon... le générique ne représente que 2 plages, le reste étant (comme toujours) des chansons... diverses. J'ai aussi acheté le single de Sash (La Primavera)... J'aime bien...

Still to be continued...


 
 

Ma. 16/06/98
18h45


  Ca y est... c'en est fini de l'internat. J'ai vidé ma chambre hier... à regrets...

Mais mon départ s'est déroulé on ne peut mieux... J'ai pu voir presque tous ceux que j'appréciais pour leur dire au revoir, et surtout, la dernière personne que j'ai salué a été Raphaël, qui m'attendait dans sa chambre, et qui en a profité pour me décrire rapidement comment se rendre chez lui facilement. J'espère donc vraiment ne pas avoir d'oral dans la période des 9 & 10 juillet, lorsque je devrais être vers Lille !

Seul petit grain de sable: je n'ai pas trouvé Rachel pour lui souhaiter son anniversaire et lui donner son cadeau (un jeune labrador en peluche). Je l'ai appelée aujourd'hui... et elle était chez elle. En fait, elle ne compte plus retourner au Jean Perrin (c'est vrai qu'il n'y a presque plus personne). Je vais donc sûrement passer chez elle demain pour lui donner la peluche...

Mais le plus important pour demain reste mon rendez-vous chez l'ophtalmologiste, à 12h15 (et pas 11h15 comme je le croyais). Mais plus le temps avance, et plus je crains qu'une seule visite ne sera pas suffisante pour que je reparte avec des lentilles à la place de mes lunettes.

Et l'étape suivante, mais non moins importante, sera l'achat de lunettes de soleil "correctes" !

Je. 18/06/98
11h15


  Ca y est, je l'ai eu, mon rendez-vous chez l'ophtalmo. Tout s'est bien passé... il n'a même pas demandé pourquoi je souhaitais passer aux lentilles de contact, comme je le pensais. Seul petit couac : il n'avait plus de lentilles à ma correction en stock. Donc il a rempli le document pour un mois d'essai gratuit de lentilles Focus Visitint, de CIBA Vision, et je l'ai envoyé immédiatement, avec une lettre accompagnatrice qui explique que c'est urgent. J'espère donc les recevoir samedi (au mieux), ou au moins la semaine prochaine.

Autre chose : je viens de me rendre compte qu'un magasin de matériel électronique divers figurant dans le magasine le Haut-Parleur propose un gyrophare annoncé "type USA", qui n'est autre que les nouveaux gyrophares utilisés pour les voitures banalisées. Et ce qui est super, c'est qu'ils le vendent même en bleu ! Le prix n'est pas excessif (290F.), mais le port est assez cher (+ 90F.). Seul petit problème : où me le faire livrer ? Je crains que mes parents ne soient pas trop pour...

Di. 21/06/98
12h45


  J'ai reçu le catalogue de W.A.T. (World Advanced Technologies), la boîte qui vend le gyrophare dont je parlais... et miracle, dans leur catalogue général, il y a le véritable gyrophare "goutte d'eau" de la police, pour 217F. (au lieu de près de 900F. comme je l'avais déjà vu). Et en plus, j'ai une remise de 20%. Bref, j'ai passé la commande hier, et je devrais l'avoir d'ici lundi ou mardi...

Autre chose : j'ai reçu la réponse de CIBA Vision... Ils me disent de me rendre chez mon ophtalmologiste, à qui ils ont adressé mes lentilles pour le 1er mois d'essai, et qu'ils m'envoient également directement le 2è mois d'essai gratuit, comme prévu. Donc j'irai en ville lundi...

Ensuite, le programme est chargé :

  • Achat de lunettes de soleil. J'hésite entre des verres argentés ou bleus, mais de toutes façons, je veux des verres tels qu'on ne me voit pas derrière.
  • Photos d'identités, sans les lunettes, ou plutôt avec les lentilles.
  • Retrait d'un extrait d'acte de naissance, à Vesoul... pour me refaire une carte d'identité.
  • Achat et installation d'une alarme pour la R21, en vue de mon séjour à Paris pour les oraux.
  • Bricolage pour faire fonctionner le nouveau gyrophare bleu.
Concernant ce dernier point, je m'y suis déjà mis. Auparavant, j'avais installé une sirène deux tons sur la R21, mais suite à un contrôle de police, j'ai décidé de l'enlever. A présent, je peux commander deux appareils depuis l'avant (flashs + gyrophare), mais un appareil peut aussi être branché directement devant, ce qui sera le cas du nouveau gyrophare.

Bon, on m'appelle pour manger, puisqu'on est invités chez les parents à Quentin cet après-midi...

Di. 28/06/98
21h45


  Le temps passe et je n'écris plus rien dans ce journal… Et pourtant, je m'ennuie… J'essaye de remplir mes journées en faisant de l'ordi, en regardant la télé, et en me baladant en voiture… Mais au fond, je m'ennuie tout de même, et surtout j'appréhende la prochaine semaine, avec ses oraux à Paris…

Mais surtout, je me sens seul… Plusieurs personnes me manquent beaucoup : tout d'abord Yves, car je n'ai pas eu le temps de parler avec lui lors de mon dernier jour au Jean Perrin, et j'ai peur que celui qui est mon meilleur ami devienne mon ex- meilleur ami, par faute de contact. Mais d'autres personnes me manquent aussi terriblement, comme Raphaël. Heureusement que j'ai sa photo accrochée au mur… je ne pourrai donc pas oublier son magnifique visage. Mais d'un autre côté, j'appréhende aussi la semaine prochaine, où j'irai le voir chez lui, car j'ai bien peur que ce soit la dernière fois que je le voie.

Je lui ai d'ailleurs écrit au Jean Perrin. Ou du moins, j'ai utilisé le prétexte des copies de photos que je devais envoyer aux PCSI2 : pour économiser des frais de port, j'ai tout envoyé à Raphaël, qui est chargé de les distribuer à l'internat. Je lui parle aussi de sa photo que j'ai accroché au mur, agrandie, et de mon passage dans les environs de Lille. Mais surtout, j'ai joint une enveloppe timbrée, pour qu'il puisse facilement me répondre, quoi qu'il n'y ait rien à quoi il puisse ou doive répondre… J'espère qu'il aura au moins la gentillesse de m'écrire un petit mot, c'est très important pour moi, même si ce n'est que symbolique…

J'ai donc fortement envie de passer à Lyon, mardi (dernier jour de cours), ne serait-ce que pour le revoir. Et cela me permettrait de rendre le livre de Daniel, voire même la peluche de Jean, et il est aussi vrai que ça me ferait plaisir de revoir Lyon… Mais d'un autre côté, je risque de tomber sur Daniel, justement, ce que je ne souhaite pas, et les Sup. vont me parler des oraux –ce que j'appréhende déjà suffisamment tout seul–, et Raphaël voudra me rendre le ventilateur, etc…

Bref, tout un tas de raisons qui me font tantôt envie d'y aller, tantôt peur d'y aller.

Cependant, tout en écrivant ces lignes, je me suis presque complètement persuadé que mardi, j'y irai… C'est décidé !

A vrai dire, pour rien au monde je ne manquerai une occasion de revoir Raphaël.

Ah oui, il faut aussi que je pense à chercher l'agrandissement de la photo de groupe chez Auchan, mardi matin…

Enfin bref, il faut donc :

  • que je bosse lundi, pour faire bonne impression auprès de ma mère (genre en rangeant mes affaires dans la cave, et en révisant un peu), histoire qu'elle me laisse partir mardi,
  • qu'il fasse beau mardi, pour que je puisse mettre mes lunettes de soleil J.
Affaire à suivre… !

Ma. 14/07/98
14h55


  Ca fait deux semaines que je n'ai plus rien écrit…

Alors en vrac :

  • j'ai reçu mes lentilles définitives, avec la bonne correction
  • j'ai passé mes oraux à Paris comme prévu, et ça s'est passé… moyennement, dirons-nous…
  • je suis passé chez Daniel pour lui donner son cadeau d'anniversaire, mais comme souvent, ça a été beaucoup trop court (je suis resté de 9h à 13h), et on n'a donc pas eu le temps de discuter…
  • je suis passé chez Raphaël, qui m'a rendu ma chaîne Lo-Fi, et qui a accepté de garder le ventilateur (youpi!). Il m'a ensuite guidé jusqu'à chez Vincent, en scooter… (Il est encore plus beau en survêtement et avec son casque de scooter)
  • j'ai ramené Vincent de Anzin à Amoncourt, puis on est allé chercher Xavier à la gare
  • le week-end s'est bien passé (ça a été de l'Internet intensif)
  • j'ai commencé à travailler chez Castorama hier.

Di. 21/09/98
23h55


  A présent, ça fait deux mois que je n'ai plus rien écrit !!

Donc je commence par les informations purement "matérielles" : j'ai intégré la CPE, une école de physique située à Villeurbanne (quelques kilomètres au nord-est de Lyon). Le moins qu'on puisse dire, c'est que je ne m'attendais vraiment pas à pouvoir intégrer une école en 3/2 ! Alors ça a été un vrai choc (dans le bon sens du terme)  d'apprendre que je pourrai rester à Lyon en école d'ingénieur.

D'autre part, j'ai fait un rencontre très importante pour mon futur proche, sur Internet. C'est un jeune de 25 ans qui m'a contacté par Email après avoir lu ma homepage. Le plus important, c'est qu'il est gay, et que… je ne sais pas pourquoi, mais une sorte de confiance mutuelle s'est installée immédiatement, et c'est donc la première personne à qui j'ai également avoué mon homosexualité. Il s'en est suivi une correspondance relativement dense, jusqu'à ce que je m'installe ici, à Villeurbanne, puisque n'ayant pas encore de ligne téléphonique, je n'ai plus accès à Internet. J'espère qu'ils vont s'activer, chez France Télécom !!

D'autre part, je suis à présent sûr d'être tombé amoureux de Raphaël. En fait, je pense que je retrouve chez lui la fragilité qu'avait Daniel, mais allié à la pureté de ses cheveux d'or, à la profondeur de ses yeux couleur océan. Je suis allé jusqu'à fixer un agrandissement d'une de ses photos au mur, de telle sorte que je l'ai toujours devant moi lorsque je suis à mon bureau. J'ai d'ailleurs été obligé d'afficher aussi d'autres photos, pour que ça passe inaperçu… Au fond, je crois que je serais prêt à tout pour qu'il éprouve un quelconque sentiment pour moi, même si je suis (malheureusement) persuadé que c'est impossible.

J'en suis carrément au stade où je passe mes soirées, mes nuits, mes matinées, à rêver à lui, à imaginer ce que pourrait être le jour où nous nous révélerions, ou juste à inventer des situations où je pourrais me rendre utile pour lui…

Le risque, c'est que je me rende un peu trop envahissant… par exemple aujourd'hui, je suis allé l'attendre à la sortie de la gare, mais lorsqu'il m'a demandé si je l'attendais, je lui ai répondu que je ne faisais que me balader dans le coin par hasard (et il semblerait qu'il m'ait cru  !). Plus tard, il a découvert dans sa boîte aux lettres un tube de colle (Loctite) qui convenait parfaitement pour réparer un truc qu'il m'avait montré il y a deux jours dans son studio. Il n'a même pas pensé à retourner l'emballage, et il n'a donc pas vu le message qui l'accompagnait. "Tu crois que quelqu'un m'a mis ça pour réparer mon porte-étiquettes ? Mais qui pourrait être aussi gentil ?"… ce sont ses propres paroles. Je n'ai d'ailleurs pas voulu rompre le charme en lui disant bêtement que c'était moi, mais je me demande tout de même à présent ce qu'il s'est dit en découvrant mon petit mot ! Peut-être d'ailleurs n'a-t-il carrément rien vu, peut-être a-t-il jeté l'emballage sans le lire… Mais cela n'est pas grave, au contraire… ça me fait encore plus plaisir d'avoir pu l'aider de manière anonyme. Ce ne serait d'ailleurs pas la première fois… L'avantage, c'est qu'il ne se sent pas obligé de me rendre la pareille, il n'a pas l'impression de me devoir quelque chose… Et c'est bien ce que je souhaite !

C'est vraiment bête, mais le simple fait de l'avoir raccompagné de la gare à chez lui, aujourd'hui, et de porter la chaise qu'il avait ramenée m'a procuré un plaisir fou. Et j'aurais même aimé porter son gros sac (ce qu'il a refusé…) ! Le simple privilège qu'il m'accorde de pourvoir rester un moment avec lui, de voir son visage éclatant à chaque fois que je me retourne vers lui, de partager un court instant l'intimité de son studio… tout cela me procure une de ces joies ! Je crois que c'est bien ça que d'être sous l'emprise de la passion pour quelqu'un. De là à savoir si ça sera de longue durée, ou encore si cela évoluera, se concrétisera, je ne le sais malheureusement pas le moins du monde, et c'est bien ce que je regrette !

Me. 25/11/98
23h15


  Une fois de plus, ça fait plus de deux mois que je n'ai plus rien écrit dans mon journal.

En tout cas, les choses ont changé… Déjà, je vois beaucoup moins Raphaël (on peut même dire "presque plus du tout" ! Ensuite, j'ai rencontré sur Internet une personne (Adrien) qui travaille à INSERM (Lyon). En fait, c'est lui qui m'a contacté un jour, après avoir lu ma page web. Ce qu'il a de particulier… c'est que lui aussi est homo. Du coup, il est rapidement devenu mon confident (d'où la quantité presque nulle de mes entrées dans ce journal). En fait, je lui raconte carrément TOUT, donc tout ce qui pourrait figurer dans ce journal. Je crois qu'il est beaucoup plus facile de se confier à quelqu'un qu'on ne connaît pas, et qu'on n'a même jamais vu en "live".

Un autre événement tout aussi marquant (pour moi) a été la "rencontre" (dans ma promo à CPE) de Guillaume… Je ne sais que dire… c'est un véritable petit amour. Oh, évidemment, il est hétéro., et je ne me fais pas d'illusions. Mais bon, il sait être si doux, presque câlin… et surtout il est si beau !

Du coup, je suis complètement scotché à lui, … je suis devenu une vraie glue ! Et (heureusement) pour l'instant, il me supporte. En ce moment, je suis comblé… il sait me consoler quand il le faut (et réciproquement), il passe presque toutes ses après-midi chez moi, et il a même déjà passé deux nuits chez moi ! Un vrai rêve. Sans aucune arrière pensée, le simple fait d'être allongé, là, à ses cotés… l'entendre respirer à quelques centimètres… sentir son contact, lorsque sa jambe vient –involontairement– se blottir contre la mienne… tout cela me fait vivre un vrai rêve. Et pourtant, comme toujours, je n'ai rien à attendre… et que c'est dur de l'entendre dire parfois ("ch'uis pas un PD moi !") en parlant de je ne sais quoi.

Qu'est-ce que j'aimerais pouvoir lui "avouer" (quel terme ignoble pour parler d'amour) mon amour ! Que c'est dur de résister, de ne pas le prendre dans mes bras quand je le vois triste, de ne pas passer ma main dans ses magnifiques cheveux lorsqu'il est allongé à mes côtés, sur mon canapé… Tellement dur que précisément, il m'arrive souvent de poser ma main sur ses épaules, ou de lui secouer les cheveux, mais jamais avec la tendresse que j'aimerais pouvoir lui donner.

Alors je me contente de faire tout ce que je peux pour le rendre heureux… j'essaie d'être présent à chaque fois qu'il en a besoin (et même plus), et je fais le maximum pour qu'il soit bien avec moi. C'est fou ce que je l'aime… C'est fou ce qu'il me manque (ça fait déjà 5h que je l'ai quitté ce soir J !!)

Guillaume, je t'aime !

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Lu. 30/11/98
17h05


  Vendredi soir, Guillaume a accepté de dormir chez moi, une fois de plus. Si ça ne tenait qu'à moi, il pourrait le faire tous les soirs… quel rêve… vivre ensemble !

Mais quelle utopie, malheureusement aussi ! Car pour l'instant, s'il veut bien passer du temps avec moi, c'est –il faut bien le dire– parce que (contrairement à lui) j'ai un PC, et qui plus est un accès Internet. Mais depuis ce week-end, Scott (son ami indissociable) en a également un, et samedi, ce sera au tour de Guillaume lui-même de recevoir le sien.

Quoi qu'il en soit, vivons au jour le jour… et ce qui est important, c'est de pouvoir rester auprès de lui, comme je l'étais vendredi soir. Lui et moi, endormis côte à côte… Aucun ne voulant faire un bruit, de peur de réveiller l'autre… Lui, émettant de temps à autre un léger râle, signe d'un rêve tourmenté… Moi, rêvant tout éveillé de pouvoir le serrer conte moi…

Que c'est dur, d'avoir à supporter toutes ces pensées qui me viennent à longueur de journée… Tout ce que je fais, tout ce que je pense, me ramène à Guillaume. Il ne se passe pas une heure sans que je ne pense à lui. Et à chaque fois, le constat final est le même : c'est un amour impossible.

J'irais même jusqu'à dire que je comprends beaucoup mieux à présent tous les suicides gays qui se passent en Amérique. Non pas que j'y pense moi-même, mais simplement je trouve que cela entraîne tellement de difficultés, surtout sur le plan émotionnel, que dans un pays tel que les Etats-Unis, le taux de mortalité gay n'est plus très étonnant à mes yeux. Car évidemment, je n'en suis qu'au stade "bénin" du problème. Lorsqu'on a fait son coming-out, le problème se corse, car c'est à ce moment qu'interviennent les commentaires, insultes ou autres, des personnes "bien-pensantes"… Mais laissons de côté ces pensées trop noires pour l'instant… Il arrivera bien un jour où j'aurai une vrai raison d'y réfléchir.

Changeons donc de sujet… Vendredi (toujours et encore le "fameux" soir), Guillaume a également commencé à entreprendre l'écriture de son autobiographie. Moi qui voudrais tout savoir de lui, de ses habitudes, de son passé, de ce qu'il aime, etc…, je me régale !

Bon, Luc vient de téléphoner… il vient tout de suite pour qu'on aille faire les courses ensemble. Donc je ne vais pas pouvoir m'éterniser sur ce journal. En tout cas, j'espère avoir des nouvelles "croustillantes" à raconter ces jours prochains !

Ah oui… je ne peux pas partir sans dire : Guillaume, je t'aime !!



La suite : 4è partie (du 1er déc. 98 au 9 jan. 00)

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